Le remboursement des PGE en 2023 va-t-il peser sur les entreprises ?

Le soutien public massif déployé pendant la crise sanitaire n’a pas d’équivalent récent : pour sauvegarder les entreprises, l’État a actionné tous ses leviers. En 2022, les premiers remboursements des Prêts Garantis par l’État (PGE) se sont déroulés sans accroc notable. Mais à mesure que 2023 avance, la tension monte. La question n’est plus de savoir si les entreprises remboursent, mais combien risquent d’y laisser des plumes sur les prochains mois. Décryptage d’une situation qui inquiète en coulisse.

Où en sont les remboursements des Prêts Garantis par l’État ?

Mieux vaut repartir du début pour comprendre l’ampleur de l’enjeu. Entre mars 2020 et juin 2022, les banques ont distribué plus de 700 000 prêts garantis par l’État, soit 143 milliards d’euros injectés dans l’économie. Le principe est simple : si une entreprise fait défaut, c’est l’État qui règle la note auprès de la banque. Habituellement, les prêts aux entreprises relèvent du jeu classique du crédit : la société emprunte, assume le remboursement, sans intervention directe du gouvernement. Mais le dispositif PGE bouleverse ce schéma, avec une implication publique inédite.

Jusqu’ici, tout semble tenir. Près de la moitié des PGE, environ 45 %, sont déjà en cours de remboursement. Cependant, la donne pourrait changer. L’inflation persistante met à mal la trésorerie de nombreuses entreprises, qui voient leurs marges se réduire. Conséquence : Bercy est de plus en plus sollicité, notamment par les sociétés de plus de 400 salariés, qui représentent des milliers d’emplois. C’est là qu’intervient le Comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri), chargé d’accompagner ces groupes stratégiques pour éviter des faillites aux conséquences sociales majeures.

Les banques courent-elles un risque ?

Le nombre de faillites d’entreprises repart à la hausse, après avoir chuté pendant les confinements. Ce contexte ravive les craintes : les banques pourraient-elles subir une vague de défauts sur les PGE ? Ces dernières semaines, le secteur bancaire a déjà été secoué à l’international, avec la chute d’une banque californienne et de sérieux remous en Suisse. Faut-il craindre une contagion en France ?

À ce stade, les chiffres tempèrent l’angoisse. Les PGE ne représentent que 11 % de l’encours total des prêts bancaires aux entreprises. Avec 45 % des sommes déjà en voie de recouvrement, le risque global reste limité. À l’origine, seuls 5 % des PGE étaient jugés risqués, un chiffre qui avait même diminué à 3,1 % en 2021 avant de remonter à 4,6 % cet été. Selon le médiateur national du crédit à la Banque de France, ce niveau demeure modéré. Pour l’instant, le système bancaire absorbe le choc.

Faillites en hausse et intervention de Bercy

Les statistiques, pourtant, ne disent pas tout. Une autre réalité s’impose : les défaillances d’entreprises ont bondi de près de 70 % au troisième trimestre. Deux secteurs trinquent particulièrement : la construction et la restauration-hébergement. Dans le bâtiment, certaines sociétés peinent à recruter, d’autres peinent à s’approvisionner, d’autres encore accumulent les retards de facturation. Résultat : les petites structures, TPE et PME en tête, sont frappées de plein fouet. Leur faible rentabilité compromet le remboursement du PGE, surtout dans un contexte où il leur faudrait générer un surplus équivalent à 5 % de leur chiffre d’affaires annuel, une barre difficile à franchir après deux ans de turbulences économiques.

Les chiffres du Ciri révèlent une autre facette du problème : plus de la moitié des dossiers traités actuellement portent sur la restructuration des PGE. S’ils ne sont qu’une cinquantaine, chacun concerne des entreprises de plus de 400 salariés ; la moindre défaillance fait peser une menace sur l’emploi local et régional.

Le vrai risque, en 2023, ne pèse donc pas tant sur les entreprises elles-mêmes, mais sur les épaules des banques et de l’État. Un paradoxe : ce ne sont pas ceux qui remboursent qui souffrent, mais bien ceux qui attendent de l’être. Reste à savoir jusqu’où la digue tiendra, et si la solidarité nationale saura absorber les secousses à venir.